je constate, je témoigne et je suis foncièrement pessimiste de raison. Sans doute plus rationnel que mes moyens le permettent. Mais je suis très ambivalent, et optimiste de désir, de rêves, voire de projets et d’action. Bien que pour l’action et notamment l’action collective sont de plus en plus au dessus de mes moyens.
Si vous me lisez (et surtout si je vous lis) c’est que je ne regrette pas les progrès techniques et y met une part peut-être excessive de «servitude volontaire».
C’est aussi parce que je trouve ici plus qu’une communauté généreuse d’ entr’aide, mais aussi des possibilités de débats, parfois passionnés, parfois même dérapants… mais aussi encore quelques esprits critiques, et même une écriture du français aussi rigoureuse que, j’imagine, l’exige la programmation. Sa clarté, ses subtilités sont aussi efficaces qu’agréables.
Évidemment, ça ne remplace pas la lecture!
Pour revenir au pessimisme désespérant et à l’optimisme, il est nécessaire de voir la réalité comme elle est, si on ne veut pas en être passivement victime, avec la sinistre répétition des erreurs humaines constantes.
Mon âge ne fait évidemment pas de moi un historien, mais un simple témoin vivant d’une époque, un point de vue parmi une myriade d’autres qui s’expriment ou non ailleurs.
La dégradation du français par une novlangue, grandement inspirée par le globish, est rarement justifiée par une nécessité, un progrès humain, mais bien plutôt par l’ignorance du vocabulaire français. La novlangue à laquelle j’ai du résister dans ma jeunesse était un lacanisme, avec le même point commun de prétendre à n’être compris qu’entre soi, des sois qui s’auto-désignent l’élite.
Le classement des élèves français au dernier rang (ou presque) des mathématiques dans le pays qui compte le plus de médailles Field, comme la dégradation massive du français (on le voit aussi souvent ici, même s’il semble parfois que l’auteur n’a pas le français pour langue maternelle).
Mais au delà de cette perte d’une école primaire heureuse (notamment pour les enseignants) et efficace, il ne suffit pas d’ espérer par le maintient d’une «élite».
Je ne parlerai pas de toutes les grandes écoles, mais d’une seule, démonstrative: l’ ENA, modifiée en surface par le président Macaron.
Il y a déjà plus de 6 ans, je crois, sa directrice énonçait dans son très officiel rapport annuel quelque-chose comme ce qui suit:
Les élèves à l’entrée comme à la sortie sont brillants, mais, il ne sont capables ni d’esprit critique, ni d’initiative.
L’esprit critique, c’est sans doute ce qui fait encore la différence la plus intéressante entre la soit-disant «intelligence» artificielle, et l’intelligence humaine. Mais il faut de l’information pour exercer cet esprit critique, ce qu’on peut, optimiste, espérer de la mal nommée intelligence artificielle.
Quant aux capacités d’initiative, l’ IA semble avoir déjà dépassé celles de nos «élites»!
Et je doute que les status de pouvoir (politiques, financiers etc.) soit les meilleures conditions pour réaliser après 25 ans ce qui a résisté aux âges encore habituellement les plus plastiques, ceux des études.
Cédric Villani compare l’enseignement des mathématiques en France, actuellement, à celle de la musique qui se farait sans jamais en écouter ni en jouer, tant son caractère ludique et affectif était inconnu, sinon interdit:
Le recteur d’académie de Reims avait refusé à certains profs de math, leurs demandes de participation au salon des jeux mathématiques, alors récemment promu par le ministère de l’éducation nationale, sous prétexte qu’«ils n’étaient pas payés pour jouer avec les élèves»
Pour en revenir au plus haut niveau des responsabilités politiques, on se souvient du propos d’ Emmanuel Walls, alors 1er ministre, dans le cadre du combat contre le terrorisme islamique qui affirmait doctement, très officiellement que «comprendre, c’est déjà pardonner!»
En conclusion, j’espère que mes évocations pessimistes continueront à permettre vos expressions d’optimismes, qu’heureusement je rencontre également. C’est bien pourquoi j’espère vivre encore le plus (et le mieux possible)
Un dernier détail, il faudrait plus d’humour. Malheureusement je sais d’expérience qu’il faut bien connaître ses interlocuteurs (on peut rire de tout, mais pas avec tout le monde), ce que ne permet pas un débat public sur internet.
Même les plus grand humoristes, ce que je ne suis pas, ont régulièrement des réactions inattendues (je me souvient de l’accusation de racisme attribué à Guy Bedos, alors que son sketch caricaturait le racisme !)
On le voit aussi ici, où même le second degré expose au malentendu!
Comment l’écrit fait facilement perdre son esprit positif «j’achète rarement dans une bibliothèque», ou plutôt, comment il est plus facile de sous-estimer l’esprit des autres, ce qui tend à remplacer l’esprit critique par un esprit de critique.
Ceci est profondément humain, et l’écriture en «réseau social» demande sans doute à réinventer des éléments de style, ou des précautions oratoires (encore que, je me souviens avoir mis en exergue «humour» avant d’écrire, et que quelqu’un m’avait lourdement chargé en oubliant le contexte d’humour pourtant lourdement affiché!
Pour la plongée, c’est trop tard, pour le reste ce sont de bons conseils, merci
(Les bons conseils, ceux que l’on suit, sont ceux que l’on se donne mais que l’on attend d’un autre pour s’y mettre!)